Un parcours à désespérer les maniaques de l’étiquetage. Ce presque sexagénaire est journaliste depuis l’âge de seize ans. Mais tandis qu’il finissait son adolescence en arpentant les stades pour un quotidien régional, « Le Maine-Libre », les profs du lycée connaissaient le jeune Guédé comme leur élève. Qu’il était. Etudiant à Sciences Po dans les années soixante-dix, il déserte les soirées de Saint-Germain-des-Prés pour passer les siennes au « Parisien-Libéré ».
(Guédé par Cabu. DR)
Il n’en sort pas moins « lauréat » de sa promotion de la rue Saint-Guillaume et prend des fonctions de direction à la Société générale de Presse qui édite des publications à destination des décideurs. Simultanément, il mène des recherches en Science politique au Centre d’étude de la vie politique française contemporaine (Cevipof). Spécialiste de la sociologie politique, il signe plusieurs articles dans la Revue française de science politique et il est rapporteur du colloque de l’Association internationale de science politique sur les élections législatives de 1986.
Chroniqueur du journal « Sud-Ouest » à compter de 1976, Alain Guédé intègre en 1981 « Le Canard Enchaîné » où il traite de l’extrême-droite et sortira notamment deux grandes affaires, celle du sang contaminé et celle des fausses factures dites de la « Chiraquie ». Sa deuxième passion, la montagne l’entraîne sur l’Himalaya, les grands « 4000 » alpins, l’Eiger, l’ouverture d’une voie hivernale dans le massif de La Grave, une première dans les Jorasses, un solo non-stop dans le Mont-Blanc, une folie dans l’Oisans avec Jean-Claude Gilles et une directe sud de l’aiguille du midi en un temps record avec Patrick Berhault. Plus quelques verticales pour le plaisir dans le Verdon.
La musique constitue un autre jardin secret. Quand il ne martyrise pas sa clarinette, il dévore tout ce qui a trait à la musique de la deuxième moitié du XVIIIème siècle. Mozart bien sûr, mais aussi cette école française que l’Histoire a fâcheusement oubliée. Cette passion il l’ a fait partager aux éditeurs de France-Musique, de la radio Suisse-Romande, de la Radio-télévision belge et quelques autres médias de grande audience. Elle lui fera découvrir Saint-George.
Militant antiraciste acharné, il comprend en 1996 que l’on ne fera pas reculer le venin raciste par la raison mais par l’exemple. Il décide alors de faire de Saint-George un allié dans le combat contre l’intolérance et d’ouvrir le procès en réhabilitation du « chevalier ». Trois ans plus tard son livre, « Monsieur de Saint-George, le Nègre des Lumières » sort en librairie, couronné par le prix Découverte des Muses. C’est le début d’une belle aventure.
Peu après ce livre est édité aux Etats-Unis, suivi, toujours chez Actes-Sud, d’une nouvelle inspirée par l’existence d’une descendance probable de Saint-George, « Le dernier chant de l’Ernestine ». Suivront une série de spectacles musicaux narratifs dans lesquels Guédé met successivement en scène Saint-George, Nanon sa mère, ou La Boëssière son ami.
De la multiplication de ces spectacles naîtra l’idée d’un opéra. A la demande de plusieurs metteurs en scène, Guédé reprend la plume qu’il trempe dans un encrier de style XVIIIème en 2004. Un an après, naît « Le Nègre des Lumières ». Il ne manquait à ce touche-à-tout que l’étiquette de librettiste. Elle est maintenant collée sur son CV, avec un codicille : « seul librettiste du XVIIIème siècle à avoir connu le XXIème ». Cette caractéristique lui offre la faculté de pouvoir peaufiner son travail et la version du « Nègre des Lumières » concoctée pour 2008 s’avère sensiblement différente de celle de 2005.