duel st george eonLe tableau peint par Alexandre Robineau. La « chevalière » d’Eon avait pris d’accrocher sur sa poitrine la médaille de l’ordre de Saint-Louis que lui avait décernée Louis XV.

Ce sera l’évènement dans l’évènement. Ce concert du 25 mars, dédié à Saint-Georges’inscrit dans une thématique artistique centrée sur le duel par le musée de l’Armée pour cette année 2024. Une remarquable exposition, intitulée “Duels. L’art du combat” se tiendra du mercredi 24 avril au dimanche 18 aout. Or l’un des « duels », bien que le terme soit assez excessif, les plus célèbres du XVIIIème siècle, n’est autre que celui que se sont livrés, le 9 avril 1787, les deux français les plus célèbres séjournant alors à Londres, le chevalier d’Eon et le chevalier de Saint-George.

Ce « fencing match » a été immortalisé par le peintre Robineau. Son tableau est l’une des pièces importantes de l’exposition. Et le “clou” de cette expo pour tous les aficionados de Saint-George. 

duel st george eonCe « duel de plaisance » inspira aussi des artistes sur un mode plus caricatural. Sur cette gravure, on reconnait notamment parmi les invités du Prince, le duc de Lauzun, réputé comme l’amant de Marie-Antoinette, et figure du XVIIIème siècle.

Le premier musicien black tirant au fleuret contre la première drag-queen : le siècle des Lumières a, décidément beaucoup à nous apprendre… A commencer par la tolérance que Voltaire nous décrit longuement dans ses « Lettres anglaises ». Cette tolérance, c’est celle du Prince de Galles, et futur roi George IV, qui aimait à s’afficher avec la “chevalière” d’Eon, cette femme, que l’on disait dotée d’attributs masculins et avec un fils d’esclave beau comme un adonis. Philidor, un autre compositeur français exilé à Londres pour en goûter ce parfum de liberté qui flottait sur la Tamise, décrit, dans ses lettres, l’inaltérable amitié qui liait Saint-George au futur roi d’Angleterre. Il raconte comment le roi fit le cadeau d’un remarquable coffret de pistolets sertis de pierres précieuses à son ami antillais. Il rapporte aussi que lorsquel celui-ci devait rentrer en France à la demande de son protecteur, le duc d’Orléans, le Prince de Galles le suppliait de ne pas s’absenter plus de sept semaines. 

salon velvet blueLe grand salon « Velvet Blue » de Carlton où a eu lieu le match.

Le prince ne pouvait toutefois ignorer que la « chevalière » d’Eon, ancien officier de l’armée française, avait autrefois été l’élève d’un maître d’armes, Mottet qui avait été aussi le maître de La Boëssière, lequel devint ensuite le mentor de Saint-George. Et, passée la soixantaine, la « dame » était encore capable de faire mordre la poussière à bien des bretteurs accomplis. Saint-George, lui, n’avait que passé la quarantaine et il était toujours considéré comme un escrimeur prodigieux. La presse anglaise de l’époque, à commencer par le tout jeune Times, était friande de ses exploits et suivait ses nombreux matches qui lui permettaient de vivre confortablement.

En sportif accompli qui se mesurait souvent à Saint-George à l’épée ou au saut de fossé (l’ancêtre du saut en longueur) et jamais en veine d’une facétie, le Prince caressa bientôt l’idée de fomenter une rencontre très peu protocolaire, épée à la main entre ces deux “frenchies” un brin excentriques. Le lieu du “match” serait le château de Carlton House, la nouvelle résidence du Prince de Galles, qu’il avait inauguré trois ans avant. Il s’agissait de la première construction londonienne dans cette architecture de style Louis XVI dont rafollait le futur souverain.

carlton houseCarlton House devint quelques années après la résidence royale de George IV, devenu régent puis Roi d’Angleterre. Celui-ci avait commandé à l’architecte Holland un palais construit sur le modèle de l’architecture française.

Aux yeux des bookmakers, il ne faisait aucun doute, que Saint-George l’emporterait haut la main. Mais voilà : Eon se présenta vêtu en femme, comme à son habitude. Un subterfuge qui troubla Saint-George, lequel savait parfaitement que la femme qui se tenait devant lui était en fait un frère en maçonnerie, initié dans sa ville de Tonnerre. Donc un homme. Mais, aux yeux du publics qui ignorait cette subtilité, il fallait afficher une certaine galanterie. Pas question, pour le métis de foncer en poussant des mugissements sur son adversaire comme sur une proie, ainsi qu’ il le faisait pour impressionner ses adversaires. Et donc, il n’attaqua pas, usant surtout de tout son art en défense. Mais à ce jeu, la dame fut plus finaude, réussissant à placer des touches sur le plastron du maestro… jusqu’à atteindre avant lui le chiffre fatidique de sept. La chevalière avait battu le champion !

Un “match truqué” ? En fait, ce ne fut sans doute pas la première fois que Saint-George, tantôt par élégance, souvent par amitié, a laissé vaincre un adversaire”. Son ami le ténor Michael Kelly le rapporte dans ses mémoires ainsi que certaines gazettes anglaises. Mais, en l’occurence, il s’agissait
de ce que la note de présentation du tableau rédigée par Hélène Boudou-Reuzé désigne comme un “duel de plaisance”. En clair : d’une démonstration de talents qui devenait un bon prétexte à la fête et aux libations, une fois les armes déposées sur leur ratelier. Et dans cette discipline, la gentry londonienne avait remarqué que Saint-George levait aussi bien le coude qu’avec une lame.

saint georgeRobineau est aussi l’auteur de cet autre tableau de Saint-George qui le représente légèrement replet, et le visage très pâle, épée à la main, une autre épée au sol symbolisant un nouvel adversaire défait.

Ne manquez pas le concert du 25 mars, dédié à Saint-George, au grand salon de l’hôtel des InvalidesConcert 25 mars – Hôtel des Invalides

Pour plus d’infos sur l’exposition qui se tiendra du mercredi 24 avril 2024 au dimanche 18 août 2024 au musée de l’Armée à l‘hôtel national des Invalides : « Duels. L’art du combat » – Musée de l’Armée

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